1817, l’admission de Claude Montal à l’Institution royale des Jeunes Aveugles | Biographie


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1817, une providence royale

Les parents Montal 1, qui avaient également deux autres enfants, nourrissaient depuis longtemps l’espoir de faire admettre Claude à « l’école des aveugles de Paris ». Ils avaient postulé à plusieurs reprises lorsqu’il atteignit l’âge limite de 14 ans…

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Arrivée de Madame Royale aux Bains de Vichy
 Juillet 1816

En juillet 1816, la nièce du roi Louis XVIII, la duchesse d’Angoulême 2, vint faire une cure aux thermes de Vichy, dont les eaux étaient déjà reconnues pour leurs vertus thérapeutiques. La publicité organisée par la mairie 3 avait devancé son arrivée et s’était largement répandue sur tout le département de l’Allier.

Aussi, la mère de Claude Montal, Marie Sayet, saisit-elle l’opportunité d’une audience royale pour exposer son vœu le plus cher : de solides études pour son enfant Claude à « l’école des jeunes aveugles à Paris ».
Elle pensait avec raison que cette noble femme, qui avait tant souffert, et dont la Restauration avait fait un véritable mythe vivant, presque une sainte martyre de la Révolution, écouterait sa voix suppliante et compatirait à sa peine ; à l’issue de l’audience, la duchesse lui promit sa protection !
Huit jours après, les parents du jeune Claude recevaient une lettre leur annonçant l’admission prochaine de leur enfant à l’Institution des Jeunes Aveugles de Paris…

Registre des Personnels des Élèves
Admission de Claude Montal (détail)

Celle-ci eut lieu le 1er mars 1817 4.

Claude Montal bénéficiait ainsi, dans le domaine certes très particulier de la formation scolaire des aveugles, de l’une des préoccupations majeures de la société française de la Restauration, le « développement de l’instruction ». La Révolution s’était déjà saisie du problème, puis l’Empire qui avait confié à l’Université le contrôle de l’instruction publique. Après 1815, une concurrence se développa, parfois tendue, entre l’Université et les congrégations religieuses qui avaient la préférence du pouvoir. Une ordonnance royale de 1816 demande aux communes de se doter d’une école gratuite. La formation des maîtres est esquissée, mais de manière très vague. Au cours des années suivantes, diverses circulaires viendront préciser les contours de cette réforme pédagogique, diversement suivie selon les départements, et le plus souvent, menée par les congrégations.

Moins de trois ans plus tard, alors que l’élève Montal obtient des résultats encourageants et prometteurs à l’Institution royale, son père Claude Montal (I) décède à Droiturier, le 20 août 1820…

Jacques Bonnaure, professeur de lettres
Thierry Géroux, directeur de la commémoration nationale « Claude Montal, VIP-2015 »

 

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1. S’étaient déplacés en 1811 dans un petit village, Droiturier, éloigné de quelques kilomètres de Lapalisse. Ils y avaient ouvert une auberge en proximité d’un Relais de poste sur la Route impériale Paris-Lyon (Carte de France en 1811, J-B Poirson, BNF/Gallica).
2. Marie-Thérèse-Charlotte de France, fille de Louis XVI et de Marie Antoinette, nait le 19 décembre 1778 à Versailles. Elle est appelée Madame Royale pour la différencier de sa tante, Madame Elisabeth. Elle subit les épreuves qui frappent la famille royale sous la Révolution. Elle connaît l’emprisonnement au Temple.
En 1795, elle apprend qu’elle est la seule survivante de la famille royale. La Convention Nationale la libère et la remet au gouvernement autrichien.
En 1799, elle épouse son cousin Louis-Antoine de Bourbon, duc d’Angoulême, fils du comte d’Artois, le futur Charles X. Devenue ainsi duchesse d’Angoulême, elle partage l’exil du comte de Provence, le futur Louis XVIII, et rentre en France le 24 avril 1814. Le mariage de la fille de Louis XVI reste stérile.
En 1815, on pouvait lire dans « L’ ami de la religion et du roi ; journal ecclésiastique, politique et littéraire…» : […] Madame la duchesse d’Angoulême, a visité, le 1er décembre, l’hôpital des Quinze-Vingts. Les jeunes aveugles de l’institution royale ont tenu, devant S. A. R., une séance extraordinaire. L’instituteur en chef a expliqué à S. A. R. les procédés employés pour l’instruction des jeunes aveugles, qui ont composé, écrit et lu des phrases dictées par MADAME elle-même ; ils ont exécuté, dans les intervalles, des morceaux de musique analogues à cette intéressante réunion, S. A. R. a été particulièrement frappée de voir communiquer un aveugle avec un sourd-muet. Elle a chargé M. l’abbé Sicard, l’un des administrateurs de cet établissement, de faire à l’élève Massieu une question, pendant que l’aveugle qui devoit y répondre étoit absent de la salle; celui-ci, après avoir palpé les signes faits par le muet, a prononcé à haute voix la phrase donnée, et il en a transmis une seconde que le sourd-muet a écrite sur le tableau. MADAME, qui a fait au docteur Guillé plusieurs questions relatives à cette communication, a daigné lui témoigner tout le plaisir que lui faisoit éprouver la découverte de cet ingénieux et consolant procédé, qui met en rapport deux classes d’êtres qui sembloient à jamais séparés par la nature de leur infirmité. S. A. R., après cet exercice, a désiré être témoin des travaux manuels des aveugles des deux sexes; elle a pris la peine de visiter leurs ateliers, et les a vus travailler aux différens métiers auxquels on les exerce, et qui, au sortir de cette intéressante institution, servent à fournir à leur subsistance. S. A. R, s’est portée à l’infirmerie, où on lui a fait remarquer un aveugle âgé de cent et quelques années, qui lui a dit avoir été un des combattans à la fameuse bataille de Fontenoy. MADAME a témoigné le plus touchant intérêt à ce bon vieillard, et a terminé cette honorable visite par celle de la chapelle de la maison, où tout avoit été préparé pour un salut auquel elle a assisté, après avoir été reçue et complimentée à la porte de l’église, par M. Planche, curé des Quinze-Vingts. […]
Devenue dauphine de France à la mort de Louis XVIII, en 1824, elle ne donne pas de descendance aux Bourbons.
La « reine douairière » Marie-Thérèse meurt de pneumonie à Frohsdorf, près de Vienne (Autriche), le 19 octobre 1851 à soixante-treize ans.
3. Délibérations du Conseil municipal de Vichy, 26 mars 1816.
4. L’inscription de Claude Montal au « Livre des personnels des élèves de l’Institution » présente une fausse année de naissance, 1804 au lieu de 1800. Il est facile d’admettre que cette erreur – volontaire – émanait de la direction même de l’établissement, sachant que la duchesse d’Angoulême, Madame Royale, connaissait de graves problèmes de vision suivis par un ophtalmologiste de renom le Dr Guillié, nouvellement nommé directeur général de l’Institution des Jeunes Aveugles de Paris, en 1815.
Les parents de Claude Montal n’auront finalement que peu menti car en 1804, était né de leur union, un troisième fils, prénommé aussi Claude !

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